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Actualité / Société, Usages & Consommation

Le législateur ne doit pas nous donner la solution, mais fixer un cap !

Publié le 20 novembre 2018

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Jean-Luc Brossard, le directeur R&D de la PFA, a exposé les résultats de l'étude prospectives sur l'évolution du mix énergétique à l'occasion de l'Atelier sur le GNV, organisée par le MAP, le 13 novembre 2018.

Pour Jean-Luc Brossard le message a été clair : il faut instaurer une neutralité technologique et laisser les ingénieurs travailler. Les échanges sont encore animés dès lors que l'on parle de l'évolution du mix énergétique.

Que retenez-vous des résultats de l'étude que vous avez réalisée ? 

Le point important, c'est de garder à l'esprit la notion de neutralité pour laisser une chance à chacun des carburants. Le GNV a sa place mais le bio GNV a un potentiel plus fort car dans une logique vertueuse. C'est comme l'électricité dont l'usage n'a de sens que si elle est décarbonée. Ce qui vaut également pour l'hydrogène. Le gaz doit être bio ou synthétique. (Etude prochainement visible dans la synthèse de l'Atleier du MAP)

Qui détient la clé pour donner une direction ?

Le client en premier lieu. Sans marché, il n'y a pas de raison pour un industriel d'investir. Le législateur intervient ensuite en influençant le marché. Il ne doit pas nous donner la solution, mais fixer un cap, car la physique est la même pour tout le monde, elle est neutre. Je retiens qu'il y a une diversité d'usages et que dans ce contexte, il y aura de la place pour l'électrique, l'hydrogène, le gaz ou des moteurs thermiques hybrides qui a le mérite d'être le moins disruptif dans la pratique. 

Le législateur pêche-t-il trop souvent par bonne volonté ? 

Sans aller trop loin, il dépasse parfois son rôle d'Etat stratège. Il doit avoir une vision qui le projette, sans privilégier de solutions par rapport à d'autres ou en imposer. Les ingénieurs dans les entreprises travailleront et apporteront des réponses adaptées aux objectifs. On voit que les constructeurs ont de véritables plans d'offensive sur l'électromobilité, dont nos constructeurs nationaux. J'ai sous ma direction 61 groupes de travail, qui se concentrent sur le biocarburant, sur l'hydrogène, entre autres choses. Nous avons un certain nombre de livrables à venir. Nous voyons qu'il y a besoin de laisser du temps au temps, d'installer des flottes de démonstration, de prouver la viabilité économique et l'acceptabilité du système. 

Il y avait quatre grands volets dans le pacte de la filière signé en mai dernier. L'un d'eux concerne la transition énergétique. Quel est le bilan à six mois ? 

Nous avons bien avancé, la PFA est devenue le point central d'écoute pour ce qui a trait à l'automobile et aux mobilités. Pour preuve, j'étais récemment à une réunion interministérielle et à cette occasion les interlocuteurs, aussi bien des membres du gouvernement que des industriels ou des énergéticiens, nous ont demandé des données précises sur le parc roulant national, considérant que nous sommes désormais la référence pour capter les réalités. Ils ont compris l'ampleur du travail effectué derrière notre étude, dont le modèle mathématique a été établi en 2009. 

Quelle est alors votre approche ? 

Le rôle de l'Etat stratège appelle à se concentrer sur le choix des infrastructures que ce soit pour le gaz ou l'électricité. Il y a un véritable coût et les villes seront confrontées à des choix engageants, entre les bornes électriques, le ravitaillement en gaz ou encore les stations hydrogène. On considère que l'amorçage de l'électromobilité est la problématique du moment car la pénétration de 1,2 % en 2018 ne permettra pas d'être à 6 % en 2020-2021. Or, il nous faut atteindre ce seuil si l'on souhaite remplir les objectifs de la commission européenne. Nous devons tous collaborer à cet objectif. Nous allons donc rencontrer les territoires pour les conseiller, d'une part, et l'Etat d'autre part, pour parvenir à un maintien du niveau d'aide au développement dont dépendent les collectivités. 

Que regrettez-vous ?

On voit que l'hybride rechargeable n'a pas fait l'objet d'une prise en compte dans le calcul du bonus-malus mais seulement dans la prime à la conversion, alors qu'il a son importance dans la phase transitoire. Nous allons donc sortir un site Internet de calcul de TCO pour le grand public et les professionnels afin d'apporter un éclairage sur un sujet qui échappe à la plupart des Français qui ne sont pas des ingénieurs familiers du sujet. C'est porté par la PFA en collaboration avec le ministère de la Transition écologique et solidaire. Le module sera à retrouver sur le site de l'Avere. 

La mobilité partagée, vecteur de nouvelles énergies ?  

Ce sont des vecteurs de fluidification du trafic. Mais d'un point de vue global, leur influence sur la production sera infime, de l'ordre de 4 à 8 % durant la prochaine décennie. La mobilité partagée concerne quelques milliers de véhicules alors que l'électromobilité joue sur des ordres de grandeur de millions d'unités, puisqu'il faut renouveler un parc roulant de 39 millions de véhicules. 

Revenons à votre étude, avez-vous été surpris par certains résultats ? 

Notre démarche porte sur le TCO. On n'intègre pas forcément des contraintes telles que la mise en place de la taxe carbone. Quand on a fait tourner le modèle, l'apparition du GNV n'avait pas été soufflée par tous nos contributeurs, à l'instar des constructeurs qui avaient alors fait l'impasse. Souvenons-nous qu'à une époque, un des constructeurs français avait fait l'impasse sur l'hybride et l'autre sur le gaz et depuis les choses ont évolué. Nous sommes donc en train de travailler à l'amélioration de notre outil afin de comprendre quels sont les paramètres qui feront émerger tel type de motorisation plutôt qu'une autre.

Un autre volet de la PFA concerne l'emploi, que pouvez-vous nous apprendre ? 

Il y a deux éléments importants à considérer qui auront un impact négatif sur l'emploi : le recul très léger de la production mondiale en 2019 et ensuite le transfert de technologie, notamment parce qu'il y aura un écart de complexité, de temps de montage et de valeur ajoutée entre les chaines de production d'un moteur thermique et celles de véhicules électriques. Le coût de la batterie sera d'environ 100 dollars le kilowatt/heure, en asymptote, soit en 2030. Pour compenser les problématiques de recharge, les gens auront tendance à opter pour des capacités les plus élevées, à l'image de la DS7 Crossback présentée à Paris qui annonce 50 kilowatts/heure, soit 5 000 euros de prix de revient. Tous frais ajoutés, la facture sera élevée pour le client. Il faudra donc trouver des astuces d'autant que 70 % de la valeur d'un véhicule électrique échappera à notre pays. Sans réaction de notre part, il faut s'attendre à une perte d'emploi équivalente à environ 30 % des effectifs attachés au groupes motopropulseurs, aujourd'hui. Raison pour laquelle nous poussons une filière de la batterie française, nous souhaitons une implication des agriculteurs nationaux dans le bioGNV et pour laquelle nous avons créé avec le gouvernement une aide globale de 18 millions d'euros à la transformation des entreprises qui vivaient du commerce du diesel. 

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